mercredi 26 octobre 2016

Le 2e RCA sur l'Ile Napoléon


Même si mes chars avancent un peu (je suis en train de terminer tout le barda qu'ils transportent), voici encore un petit épisode issu du JMO du 2eRCA (de la 1ere DB)... Oui, je sais, ce n'est pas le régiment que j'ai choisi de représenter sur les tables de jeu !
Ce petit passage est sympa... A travers ces lignes, on revoit le tireur du char "Fury" dans le film éponyme...

"L'ILE NAPOLEON


C'est le 21 novembre (1944). La veille, le 2e escadron, parti de DELLE, s'est ouvert la route vers le RHIN après une demi-journée de combat où, la main dans la main avec les ZOUAVES, sans reprendre le souffle, trois villages ont été pris d'assaut et de nombreux prisonniers faits. Une étape de nuit tous feux allumés, souvenir inoubliable, avait porté tout le monde, exténué et joyeux, sur les bords du RHIN.
Il s'agissait maintenant de bondir sur MULHOUSE et particulièrement pour l'escadron d'en commencer l'encerclement.
Parti de SIERENTZ, le peloton SOUBIROUS* fonce rapidement. Objectif cette mystérieuse ILE NAPOLEON, clef de la grande cité alsacienne, curieuse rosace de routes et de canaux, en lisière de la forêt de la HART pleine de menaces et d'inconnu, il fallait prendre intact ces quelques six ou sept ponts, pour cela gagner de vitesse l'allemand encore étourdi de surprise et terminer la manœuvre avant la nuit.
HABSHEIM est rapidement traversé par le tonnerre des Sherman marchant au maximum des moteurs.
« Une barricade suspecte devant à un kilomètre » signale la radio du maréchal des logis GOURLAND qui, sur le PARIS a aujourd'hui l'honneur d'être en tête. « En avant. Allez voir ; on vous appuie ». Le peloton repart.
Dans chaque char, les tireurs s'écrasent le front contre leurs lunettes et fouillent le terrain. La batterie d'artillerie qui suit tout près, s'arrête en travers de la route, prête à déclencher un barrage sur ce village de RIXHEIM qui n'a pas l'air de vouloir se laisser aborder facilement.
L'aboiement sec d'un 75, l'écho de l'éclatement de l'obus ; le PARIS a tiré. Brusquement une grosse fumée noire monte dans une explosion, on voit l'équipage sauter à terre tandis que les artilleurs et les autres chars déclenchent sur le village un tir écrasant et rapide. Mais sous les balles allemandes qui partent des caves, l'équipage bondit à nouveau dans son char et son tir reprend. Allons, ce n'est pas grave mais il faut le dégager et surtout continuer en avant. Rapidement le reste du peloton SOUBIROUS contourne RIXHEIM par la droite « détruit les canons » d'une unité de D.C.A. qui tentait de se défendre et fonce sur son objectif sans s'occuper du reste. Le peloton HENRARD pousse en avant dans le village, tandis que les zouaves nettoient les vergers à gauche de la route. Les allemands encerclés se rendent au nombre de 80. Qu'était-il arrivé au PARIS ? Touché, à bout portant par un bazooka, blindage traversé, aveuglé par la flamme qui avait jailli dans la tourelle, l'équipage croyant le char en feu avait sauté dans le fossé.
Au bout de trente secondes, voyant que rien ne brûlait, sauf à 400 mètres en avant le camion essence que le premier obus du PARIS avait touché, tout le monde reprenait sa place et continuait le combat. La course éperdue recommence, MULHOUSE doit être coupée avant la nuit.
Lorsque le soir tombe, L'ILE NAPOLÉON forcée en quelques minutes, l'objectif largement dépassé, encombré de 400 prisonniers, l'escadron couche au nord de la grande ville empêchant toute fuite allemande vers l'est et enlevant tout espoir de renfort de ce côté.
Ce soir là l'équipage du PARIS a bien dormi."

Chars LOURDES, ANGERS, BEAUVAIS, BECON LES BRUYERES, PARIS, CHAMPEAU et METZ


mardi 18 octobre 2016

12e RCA, 2eDB, Vosges 1944



Voilà un petit montage...


... inspiré de cette photo :




dimanche 16 octobre 2016

Galfingue, 25 novembre 1944 (suite)


25 novembre 1944. La prise de Galfingue n'a posé aucun problème. Mais la nuit tombe et une contre-attaque allemande se dessine.
Voici comment le JMO du 2eRCA résume l'attaque française du 25 novembre  au soir et la contre-attaque allemande nocturne sur Galfingue :

"Le 25 novembre, le Combat Command reçoit la mission de se porter sur le PONT D'ASPACH (17 km. ouest de MULHOUSE) afin de couper la retraite aux troupes allemandes refluant vers le nord.
Les escadrons de NAUROIS et VIE entrent dans la composition d'un groupement aux ordres du colonel de LEPINAY. DIDENHEIM, HOCHSTATT sont enlevés à l'ennemi après de durs combats. A DIDENHEIM l'ennemi laisse quarante cadavres sur le terrain et trente prisonniers tombent entre nos mains. A la tombée de la nuit, les éléments de tête, escadron VIE, et compagnie FAUGERE du 2e Zouaves, atteignent les lisières est de GALFINGUE fortement tenues par l'ennemi. Il est décidé, de passer immédiatement à l'attaque. Au clair de lune, les chars de l'escadron VIE pénètrent dans les étroites rues du village, propices aux embuscades. Plusieurs maisons brûlent, des chars sont atteints par des panzerfaust mais ne subissent pas de grosses avaries. Une vingtaine de S.S. sont retranchés dans une maison et refusent de se rendre. L'immeuble devra être détruit au canon. Après deux heures de lutte, les allemands contre-attaquent le village de tous côtés, appuyés par des Jagpanthers. Un déluge d'obus explosifs, faustpatronen et de balles traceuses s'abat sur la localité. Le lieutenant de SAINT TRIVIER est tué près de son char, le sous-lieutenant EYRIN et le maréchal des logis chef COLONNA d'ISTRlA, du peloton de mortiers sont grièvement blessés. Plusieurs chars sont atteints par la grêle de projectiles. Le char du sous-lieutenant BERNARD réussit à atteindre un Jagdpanther qui flambe immédiatement. Après quarante minutes d'un combat extrêmement violent, l'ennemi se replie en désordre.
Cette nuit de GALFINGUE ne sera pas oubliée de longtemps pour ceux qui la vécurent."
Les éléments 338 VGD sont donc maintenant soutenus par des Jagpanthers du 654e bataillon de chasseurs de chars.
Racontée par le capitaine de l'escadron, voici ce que donne cette affaire :

"Le Colonel arrive sur les lieux, suivi de son immense colonne qui embouteille complètement la partie centrale du village. Les ordres sont aussitôt distribués et le dispositif de nuit, pris. Les issues seront gardées par les chars vers HEIMSBRUNN, par l'ALSACE, le TOURAINE, le MOSELLE et le MORBIHAN vers BERNWILLER, par l'ILE-DE-FRANCE, le MAROC. L'ANJOU et le BÉARN (on y adjoindra deux 57), vers SPECHBACH, par une charrette placée en travers et les chars de volant ; le centre recevra le PC. du Colonel ; l'infirmerie, etc… Tout le monde s'organise, se restaure, et prend ses dispositions pour passer la meilleure nuit possible dans les chars, car, si la fatigue se fait sentir, on a malgré tout, l'impression d'être un peu en l'air dans ce petit village à peine conquis.
Vers une heure du matin, un ronronnement continu tire l'oreille d'une sentinelle du troisième peloton. Lointain, mais pas comme les autres et bientôt accompagné d'un et de deux et de plusieurs. Le silence total de la nuit nous permet de bien écouter, Il n'y a pas de doute ce ne sont pas des moteurs de chez nous,.. Mais le bruit paraît prendre une direction autre que la nôtre, et bientôt s'efface et disparaît peu à peu. Bah.., on verra bien demain, et tout le monde, sauf un homme de garde par char, de se replonger dans un sommeil réparateur.
Les chars du 3e peloton sont en quinconce dans la rue. Devant eux, un 57, à droite, près du transformateur, un autre à gauche, une section de zouaves occupe les lisières de cette partie du village.
Une première fusillade surgit dans la nuit tout d'un coup, vers 1h50... assez soutenue, nourrie. Puis, subitement, l'orage éclate, tonitruant et fantastique de tous les côtés, les obus arrivent en trombe, déchirant l'air à une vitesse impressionnante. Au-dessus de nous, les mitrailleuses de 20, emmêlent rageusement leurs traînées de feu, rasent les toits et leurs éclatements secs sont bientôt renforcés des magnifiques et flamboyantes explosions des panzerfausts qui tombent un peu partout, tirés d'on ne sait d'où... Deux secondes pour que tout le monde soit à son poste, mais, qu'y comprendre dans tout ce tintamarre ? On n'y voit rien, et d'où cela vient-il ?
Soudain, une forme imprécise, mais, impressionnante surgit droit devant nous, tout près. Avant de se rendre compte de quoi que ce soit, cette ombre crache une flamme gigantesque... Le 57 du transformateur reçoit de plein fouet un obus qui le met en morceaux. Pauvres servants ; qu'êtes-vous devenus ? La pièce à gauche tire à bout portant, mais son intervention attire une réplique brutale qui la met hors de combat. Un, deux, trois coups partent rapides, la maison de droite est en feu et dégage une fumée âcre et épaisse du même coup, l'half-track qui est juste au pied du mur est elle-même touchée en plein.., elle vomit immédiatement une lourde fumée noire qui prend des aspects terrifiants sous les lueurs de l'incendie... Une forme, probablement le conducteur, en jaillit en torche, et, frénétiquement, se roule à terre dans d'horribles souffrances.
L'half-track de gauche subit le même sort. Et bientôt, la nuit devient dantesque. La fumée nous gêne terriblement un écran opaque s'est formé devait nous. De grosses volutes lourdes et denses passent lentement et nous empêchent de distinguer quoi que ce soit. Tout le monde tire au jugé il faut se garder de tous côtés car les fantassins boches se sont infiltrés et nous prodiguent les bazookas et les rafales d'armes automatiques. Des deux côtés, une gigantesque sarabande de mitraille et d'obus se déchaîne et le duel devient sauvage. La rue où nous sommes est maintenant prise d'enfilade. L'ANJOU évite de justesse un boulet qui fracasse le mur contre lequel il se trouve. Le MAROC et l'ILE-DE-FRANCE tirent tant qu'ils peuvent, le BÉARN est touché de plein fouet heureusement pour lui ce n'est qu'un explosif. Soudain, l'écran de fumée se déchire.
Un "frein de bouche" apparaît alors à 40 mètres, crachant fumant, sûr de lui. Puis soudain plus rien, une fumée noire et rouge l'entoure et le happe au même moment, le lieutenant de SAINT-TRIVIER qui, descendu de son char, est venu en personne se rendre compte de la situation, tombe au milieu de la rue, mortellement atteint.
L'ILE-DE-FRANCE se déplace alors et, prenant la rue d'enfilade, lâche droit devant lui, au ras du sol, deux perforants coup sur coup ; une immense flamme jaillît là-bas. Touché, victoire ! !
Ah, comme il flambe bien… Une avalanche d'obus et de balles déferle sur cette carcasse qui commence à exploser et soudain la fusée verte (signe du repli chez les boches), monte et illumine le sol. Nos zouaves se précipitent dans un magnifique élan, embrochent quelques fuyards, mais le gros s'est déjà sauvé. Un calme impressionnant succède à l'infernal tapage de tout à l'heure rien, on n'entend rien, si ce n'est les craquements des maisons qui brûlent et s'effondrent et la chanson des étincelles qui s'envolent. Les minutes passent… toujours rien. Et nous attendrons ainsi jusqu'au lever du jour, les yeux brûlés de sommeil et les nerfs en pelote.
C'est alors seulement que nous réaliserons… devant le triste spectacle, éclairé d'un jour sale et grisâtre de ces cadavres, de ces carcasses tordues par le feu, de ces deux canons détruits, écrasés par le gros fantôme qui est là (ie : un jagpanther), lui-même, encore fumant et lamentable.
Nous pouvons alors nous rendre compte qu'après avoir fait ses premiers dégâts, il s'est aventuré confiant ; et qu'un obus, probablement tiré par le MAROC lui a coupé une chenille c'est alors qu'il a voulu reculer et que, ce faisant, il a fort agréablement présenté le flanc aux perforants de l'ILE-DE­FRANCE.
Nous apprenons également que 77 blessés sont passés au poste de secours durant cette nuit où le médecin auxiliaire TEBOUL a été grièvement blessé. (aspirant LAVIGNE, BARTEL, FIEUJAN qui mourra quelques jours plus tard et combien d'autres). Les renseignements nous arrivent et nous apprenons avec un certain froid dans le dos que 10 de ces automoteurs avaient encerclé le village, et que profitant de leur soutien massif, l'un d'eux avait tenté de forcer le passage escorté d'une compagnie de fantassins abondamment dotés de panzerfaust et d'armes automatiques.
Mais l'ennemi a fui. Le village a souffert mais il nous est resté. Et leurs monstres n'ont pas fait peur à nos braves petits gars. Et c'est avec une juste fierté qu'ils se souviennent de cette nuit de cauchemar, de cette nuit de victoire."

(Photo ECPAD)

1er et 2eme peloton du 3 escadron (capitaine Vie), présents à Galfingue.
Shermans M4A4 à canon de 75mm :